Ils avaient osé. Les Serpentards n'avaient eu aucune retenue, prétextant une malencontreuse erreur. Remus avait fuit, quitté le cours en courant. Sans que je ne puisse réagir, Patmol venait déjà héroïquement à la rescousse de Lunard. Je n'en attendais pas moins : Je n'avais pas eu le temps de dire "J'aime le Whisky pur feu, surtout parce que je n'ai pas le droit de le boire, parce que je ne suis pas majeur." que les deux serpentards s'étaient transformés en serpillères, leur larmes inondant le sol devant leur crânes chauves. Je riais aux éclats. Seul Sirius savait comment me rendre dans un état pareil. Sonnerie. J'observais autours de moi, sans l'apercevoir. Il avait du courir derrière Remus pour aller le réconforter.

Je sortis des cachots et me dirigeais vers le parc. Il n'y avait aucun doute, Remus et Sirius devaient être là bas. Et si ils n'y étaient pas, j'irais noyer un ou deux Serpentard dans le lac, promesse de James. Avant d'atteindre les portes du château, je me retrouvais avec un petit problème urgent. Toilettes. Bon sang, James Potter, quand aura tu une vessie à la hauteur de ton ego ? Je me dirigeais vers l'antre des sorciers mâles, et me soulageais. Si Sirius était là, il aurait été fier de moi ; je ne ressemblais à rien de plus qu'un Biggle à trois tête ayant une infection urinaire. Une fois ma petite affaire terminée, robe de sorcier retombée, j'allais me laver les mains. (Pour sentir le phenix et l'hydromel, parfum que les filles affectionnent particulièrement et qui est aussi, étrangement, le parfum des savons de Hogwarts.) Une masse informe et bleuâtre traînait sur le sol ; un reste de la boule d'encre qui avait frappé Lunard. Je la ramassais quand une idée fantastique, fabuleuse, génialissime, incroyable, digne de James Potter, Cornedrue, l'un des Maraudeur me frappa.

Je retournais vers l'extérieur, la petite boule coincée entre mes doigts. Je marchais doucement, laissant le temps à Sirius de parler avec notre préfet benêt adoré. Ils avaient des discussions que j'étais impossible de tenir. Non pas qu'elles étaient ennuyantes (parler de sentiments, et tout ce qui s'en suit.) mais plutôt que je n'étais pas très doué pour ce genre de discours. Et Remus, lui, en avait besoin, à l'instant même. Je les voyais, au loin, accoudés à l'arbre des Maraudeurs. Je regardais autours de moi, conscient qu'ils étaient toujours très occupés. Je contournais discrètement l'arbre, près à faire un énorme détours pour mettre en place mon plan. Une fois arrivé derrière lui, je montais aux branches basses, espérant qu'elles ne craqueraient pas sous mon poid comme Sirius s'amusait à dire. Je prenais la boule d'encre et murmurais:

James Potter - Aguamenti.

Une fois la boule d'encre à nouveau trempée, je tendis à nouveau ma baguette vers elle, et la touchait de son extrémité.

James Potter - Amplificatum!

Je la voyais grossir au creux de ma main. Un rictus aux lèvres, je m'appliquais à l'étaler sur le visage et les cheveux. Une fois devenue aussi bleu que le chapeau de Merlin, je séparais l'objet en deux, me penchais sur la branche et tendis la main.

James Potter - Wingardium Leviosa!

Je dirigeais les deux morceaux au dessus de la tête de mes deux compères. J'espèrais montrer à Remus que, s'il s'était sentit ridicule, il ne le serais plus jamais nous tous réunis. Je levais le sort. L'encre tomba, et s'écrasa sur les deux autres Maraudeurs. Je pouffais de rire.

HJ - On garde cet ordre alors ?

DJ-

Je ne l'avais pas senti venir. J'étais tellement préoccupé par cette histoire que tous mes sens s'étaient endormis. Ce n'est que lorsque ses mots me parvinrent aux oreilles que je levai le regard vers lui, m'efforçant de ne pas montrer combien tout cela m'avait touché. Il était évident que, plus encore qu'être en colère suite à cet acte, Sirius serait peiné de me voir offensé. Même s'il mettait en oeuvre toutes les tactiques et efforts possible pour ne rien afficher, arborant un visage marmoréen, je connaissais sa grande sensibilité, surtout envers James, Peter et moi-même. C'est ce qui, en lui, me touchait le plus. Je savais que je pouvais à n'importe quel moment me reposer sur lui, et que, même s'il était maladroit, je saurai toujours trouver réconfort au fond de ses yeux.
Je lui souris, un peu tristement. J'aimerai, oui, à jamais profiter de cet arbre et le protéger comme ils nous protègent. Peut-être que je suis un peu trop sensible ou simplement un peu fleur de peau mais j'éprouve une véritable affection pour cet endroit, comme un sorte de repère, de cocon. Nous nous sommes toujours retrouvés aussi, comme une évidence et je ne compte plus les samedis ou dimanches après-midis entiers où nous flânions assis, là, juste là.
Lorsque je me concentre un peu sur toi, je me rend compte que tu as couru. D'ailleurs, tu sens le chien mouillé. De la même façon, j'aperçois un drôle d'air fier que tu tentes de camoufler derrière un faux air innocent. Je plisse les yeux, tentant de te sonder, ayant peur de déjà en connaître la raison. Mais je m'apaise lorsque tu t'assois calmement à mes côtés, réglant ma respiration sur la tienne. J'aime vous sentir auprès de moi. Votre aura m'est si ressourçant et si particulière que parfois je m'imagine que l'Autre la sent aussi, celui qui s'éveille une fois par moi. Je sais que lorsque vous êtes là, ces soirs là, il est bien plus calme comme si vous parveniez lui aussi à l'apaiser quand il est en colère.
Un mouvement de ta part éveille enfin mes sens et me sort de mes pensées. Je tente alors vivement de l'esquiver, me doutant déjà de la nature de ton geste mais trop tard... Ta main s'insinue entre mes cheveux et les bataille en tout sens.

- Sirius, j'avais enfin réussi à les coiffer ! Je préfère rester loup que ressemble au vulgaire chien que tu es !

Je souris à pleine dent, aimant me moquer de son animagus, bien que je l'ai toujours trouvé digne de Sirius pour ce qu'il représente. En sentant des épis se dresser sur ma tête, je grimace et tâtonne mon crâne pour tenter de les aplatir à nouveau. Rien à y faire, mes cheveux ont depuis bien longtemps cessé d'obéir à la loi de la gravité après le passage de la tornade Sirius. Néanmoins, je continue à sourire, ravi d'avoir réussi à me chasser les serpentards de la tête.
Tu reviens cependant sur le sujet, tentant de me rassurer en me rappelant que vous y êtes aussi passé. Je hausse discrètement les épaules. Je sais bien qu'il est ridicule de le prendre aussi mal ; ce ne sont que d'imbéciles farces qui ne sont pas censé m'atteindre. Mais je me sens juste humilié... peut-être même rejeté. Je n'en ai que faire d'avoir eu la tête pleine d'encre ou d'avoir attisé les rires d'une classe entière. Je ne veux simplement plus sentir encore et encore ce sentiment d'être haï et rejeté ; je n'en peux vraiment plus, tu sais...
J'ouvre plusieurs fois la bouche, sans trop savoir quoi te répondre. Il ne me semble pas convenable d'ignorer le sujet ou même d'en changer trop vite mais les mots me manquent. Parler véritablement de ce que je ressens serait rentrer dans une discussion que je ne veux pas avoir à l'approche de la pleine lune, moment où je suis bien trop susceptible. Je ne supporterai pas d'avoir un avis contraire ou différent du mien, je me connais trop bien. Même si j'en ai honte et aimerai faire des efforts, il est souvent plus fort que moi de piquer des colères ou de me sentir blessé. Au moment où je me décide enfin à te répondre, au final, que je préférai qu'on évite d'en parler maintenant, j'entend au dessus de nos têtes quelqu'un murmurer un sort et, avant même que je ne puisse lever le regard, une espèce de liquide gluant chuta en cascade sur nos deux têtes. Je me relève brusquement, cherchant à chasser de mes yeux ce que je reconnais être de l'encre pour voir qui a fait ça. Je me débat un instant dans des grognements de rage avant de me débarrasser violemment de ma cape, de m'en essuyer le visage et de la jeter parterre.

Tremblements de colère. Mes sens sont aveuglés. Mes poings se serrent à m'en faire mal. Je cherche, je fouille, j'observe. Un instant. Puis je le vois, perché sur le gros chêne, un grand sourire aux lèvres. James. Pourquoi a-t-il fait ça ? Pourquoi a-t-il osé se moquer de moi comme l'ont fait ces serpentards ? Suis-je si ridicule pour mériter tant d'insultes ? Lorsque je le vois couvert de bleu lui aussi et que j'aperçois Sirius dans le même état que moi, je pense comprendre son attention mais me refuse à le faire véritablement. Hors de question. Mes bras s'agitent dans les sens avec automatisme et lorsque j'ouvre enfin la bouche, je me surprend à crire.

- Mais c'est que ca t'amuse ? Tu ne crois pas que je m'en suis assez pris !? Tu penses vraiment que j'affectionne l'encre au point d'en vouloir partout sur moi ? Mais à quoi vous pensez tous les deux ? Croyez-vous vraiment être plus malins qu'eux avec toutes vos blagues plus stupides les unes que les autres ? Pour qui vous prenez vous, bande de gobelins immatures !? Vous ne valez pas mieux que la cervelle d'un Hippogriffe !

Mon souffle se saccade. Je sens mes joues devenir rouges et mes muscles se nourrir de ma colère. J'aurai voulu hurler plus fort encore mais je sens déjà des regards se tourner vers moi. Lorsque je vois leur air intrigué, tous prêt à en entendre plus, je comprend enfin que je viens d'hurler contre ceux qui ont simplement voulu prendre soin de moi. Me rassurer. Me faire du bien. Et même si j'aurai préféré ne plus me retrouver avec une tâche d'encre sur la tête, je comprend que James a fait ça pour que nous soyons, une fois de plus, tous dans le même panier. Soudain, je me surprend à rire aux éclats tant que j'en ai vite mal aux côtés. Je me plie en deux, les mains sur le ventre, riant encore et encore. Et lorsque je tente de me calmer, de me redresser pour leur faire face, je les vois tout deux recouvert d'encre et mon rire reprendre de plus.

-Oh bon sang... je suis... tellement... dé... aha;.. désolé de vous... vous avoir parlé comme ça... ahahha... je crois que... je suis... un loup de mauvaise humeur... Pardon...

Je crois que je ne m'étais définitivement pas attendu à ça. Entendre Remus hurler contre moi alors que Sirius s'agitait frénétiquement dans une imitation peu réussi de la "Danse des Hypogriffes sur balais."
J'étais apeuré. Remus me hurlait dessus. Vraiment. Remus me hurlait dessus ! Cette fois-ci, ma blague était allée trop loin, et alors que j'espérais lui faire plaisir, j'avais tapé à côté. Et bien à côté. Je me demandais comment Sirius allait réagir, lui qui était le plus enclin à comprendre la plaisanterie. Allait-il en rire et calmer Remus en prenant ma défense, ou étais-je à nouveau en plein délire?

Alors que ma bouche s'ouvrait de plus en plus, figée dans une stupeur qui devait me rendre méconnaissable, la scène devint encore plus invraisemblable. Lunard riait aux éclats et Sirius en faisait de même. Avais-je atterris dans un monde parallèle? Remus devait en être capable, puisqu'il était capable de hurler alors que je pensais qu'il aurait à jamais une extinction de voix. Je clignais des yeux pour les voir se tordre de rire tous deux, de plus en plus fort. Le goût de l'encre étalé sur mes lèvres entrait dans ma bouche, me donnant presque la nausée. Sirius pointa sa baguette vers moi. Non, je n'étais pas dans une autre dimension et ils allaient se venger. Ayant eu un aperçu de la fureur de Remus, je n'aurais même pas imaginer celle de Patmol. Je sentis une légère pression sur mon corps. Elle me fit perdre l'équilibre et je sentais mon corps basculer peu à peu en arrière. J'essayais ridiculement de me rattraper à chaque branche, et je tombais, un peu comme au ralentit. Misérablement. Le sol dur tourmentait affreusement mes fesses encore douloureuses de ma précédente ballade nocturne avec Lunard. Je voyais à présent leur pied et leur jambes, le reste de leur corps cachés par les branches basses de l'arbre. J'entendis Remus dire quelque chose, sans savoir quoi. Préparaient-ils encore une autre farce?

Je me relevais progressivement, prenant appuie sur le sol pour voir mes deux compères me sourire amicalement. La situation devenait complètement loufoque. Il devait y avoir une substance illicite dans cet encre.

Sirius Black - James ! Je vais chiper ton vif d'or pour le rendre de la même couleur lors du match ! Tu ne verras du bleu et que du bleu jusqu'à la fin de tes jours ! Même sur le bout de ta langue et sur les ongles d'Evans, tu ne verras que du bleu! Je te maudis !

J'écarquillais encore plus les yeux. Il ne pouvait pas être sérieux, non ? Hein ? Par réflex, je serrais la main dans ma poche et agrippais non pas ma baguette mais mon vif d'or, conscient que mon geste était à la fois stupide et immature.

James Potter - Lunard, Patmol ! J'espérais vous faire plaisir, vous montrer que les Maraudeurs sont toujours là les uns pour les autres non ?... Je suis désolé Remus... Sirius. Je ne suis pas un Serpentard non plus, vous n'allez pas me faire vivre un enfer. Il vous faut quoi, pour accepter mes excuses?

Ils souriaient tous deux à pleines dents. Ma voix avait été plantée dans les aigu. Je me sentais ridicule. Que mijotaient-ils tous les deux pour me punir ?...

Mes yeux s'inondent de larmes incontrôlables tandis que mes jappements hilares résonnent dans le parc. Ma respiration devient d'aiguës sifflements et, à chaque fois que je tente de la retenir pour me calmer, mes rires reprennent de plus belle. Redoublement d'intensité lorsque James tombe de l'arbre, mes cotes commencent à me faire souffrir et je me noie dans des toussotements tous plus douloureux les uns que les autres. Une main sur le ventre, je fini par m'appuyer sur l'arbre pour ne pas chavirer et reprend tout doucement un souffle plus stable. Bon sang, si James avait pu voir son air lorsqu'il m'a entendu hurler ! ... Je donnerais n'importe quoi pour le revoir. Je ricane à cette pensée, me calmant seulement lorsque Sirius se mit à crier sur James d'une façon bien plus légère que je n'ai pu le faire précédemment. Même si, à présent, je m'en veux beaucoup d'avoir osé hausser le ton contre eux, je sais que ce n'était qu'un incident de parcours. Ni James, ni Sirius ne m'en feront affront et des excuses sincères suffisent à calmer les hostilités que j'aurai pu ouvrir. Je les regarde, plissant les yeux pour ne pas être aveuglé par le soleil et, tandis qu'ils se chamaillent, je les couvre d'un regard à la fois amusé et encore hilare, mais avant tout reconnaissant.
Inconsciemment, j'appuie les remarques de mes deux compères de petits rires discrets, marquant une pause pour reprendre mon souffle. Tandis que James tente de reprendre ses esprits, déboussolé et par sa chute et par les paroles de Sirius, précédés des miennes, j'observe un instant le parc, à la recherche de Peter. Où pouvait-il bien être ? On ne le voyait pas beaucoup ces derniers temps. Pourtant, à l'accoutumée, il était sans cesse près de nous, bien trop effrayé par la foule pour se séparer de nous plus de quelques secondes. Esperant muettement que rien ne lui soit arrivé (tu parles!), j'avance de quelques pas et m'assoit près de James, époussetant la poussière de sa cape, étalant en réalité l'encre sur toute la largeur. Alors qu'il se confond en excuse, je pouffe de rire en observant les fines branches d'arbre coincés dans ses cheveux.

- Hé Rodolphe, petit rêne au nez rouge, tu as oublié d'enlever tes bois, ce n'est pas très discret !

Amicalement, je lui tapote le sommet du crâne, entre les deux branches d'arbres coincées qui lui donnaient l'air d'avoir de drôles de cornes. Discrètement, je fais un clin d'oeil à Sirius, tentant de lui faire comprendre que nous avons intérêt à continuer sur notre lancée pour ne pas laisser James s'en sortir comme ça.

- Patmol, tu ne trouves pas que James a pris du poids en ce moment ? Tu as vu comme les branches ont craquées sous lui ?

Je tourne mon regard vers James, tentant de le rendre le plus sérieux que possible afin qu'il ne flaire pas trop vite la blague. Je l'observe de la tête aux pieds, comme si je jugeais sa prise de poids et affiche une drôle de grimace.

- On dirait un petit rêne qui aurait trop mangé les patacitrouilles de Merlin.

UN CERF !